Le baryton Edwin Crossley-Mercer souffrant sera remplacé par Jóhann Kristinsson pour le concert du 15 octobre.
Ravel : piano prodige
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Quand l’essence de la tradition européenne rencontre l’énergie du Nouveau Monde… Révélé l’an passé à Toulouse, le jeune pianiste Tom Borrow fait ses débuts au Capitole avec le Concerto pour piano et orchestre en sol majeur de Maurice Ravel. Entre hommage aux rythmes de jazz et virtuosité redoutable, l’œuvre demeure un « Everest » des musiciens d’hier et d’aujourd’hui.
Deux concertos, deux chefs-d’œuvre
En 1928, Maurice Ravel a découvert les États-Unis où il se produit comme chef d’orchestre et comme concertiste. À New York, le compositeur français rencontre George Gershwin qui contribue fortement à la genèse du Concerto en sol majeur. Composé en 1931, ce dernier est exactement contemporain du Concerto pour la main gauche, l’autre chef-d’œuvre pour piano et orchestre de Ravel. Ce qui n’est pas un mince paradoxe, tant Ravel composa peu, et uniquement des chefs-d’œuvre ! Mais le musicien a décidé d’explorer l’ensemble des horizons offerts par le dialogue entre le clavier et l’orchestre. De fait, à eux deux, les concertos de Ravel rassemblent l’éventail des possibilités concertantes en ce début de XXe siècle.
« Entreprendre deux concertos simultanément était une expérience intéressante. Celui dans lequel je me produirai en tant qu’interprète est un concerto dans le sens le plus exact du terme, je veux dire qu’il est écrit exactement dans le même esprit que ceux de Mozart et de Saint-Saëns. À mon avis la musique d’un concerto peut être gaie et brillante et il n’est pas nécessaire qu’elle prétende à la profondeur ou qu’elle vise à des effets dramatiques. […] Le Concerto pour la main gauche seule est de caractère assez différent et en un seul mouvement, avec beaucoup d’effets de jazz, et l’écriture n’en est pas aussi simple. Dans une œuvre de ce genre, l’essentiel est de donner non pas l’impression d’un tissu sonore léger mais celle d’une partie écrite pour les deux mains. Aussi ai-je eu recours à un style beaucoup plus proche de celui, volontiers imposant, qu’affecte le concerto traditionnel. »
Ravel cité par Alfred Cortot dans La musique française de piano, 1932.
Mozart, Saint-Saëns, Gershwin : une triple influence
Au Concerto en sol majeur la grâce classique, donc. À celui pour la main gauche la tradition héroïque issue du romantisme. Classicisme mozartien, virtuosité brillante à la manière des concertos pour piano de Saint-Saëns, inflexions jazz de Gershwin… Chacune de ces trois influences se déploie dans l’œuvre. De Mozart, Ravel hérite un orchestre réduit, le dialogue omniprésent entre le soliste et les pupitres de vents. À Saint-Saëns, il emprunte une virtuosité éblouissante, si difficile que le compositeur, affecté par des soucis de santé, dut renoncer à créer sa pièce et en confier la partie soliste à Marguerite Long. L’esprit de Gershwin, enfin, plane sur les mélodies « blues » du premier mouvement.
Là où le Concerto pour la main gauche explorait une veine tragique, celui en sol majeur refuse tout assombrissement. Jubilante, l’œuvre associe une virtuosité digitale à une légèreté expressive où se laissent deviner les audaces rythmiques propres au musicien français. Pièce phare du répertoire pour piano, le concerto est aussi l’un des chefs-d’œuvre de l’orchestre : Ravel déploie un effectif vaste – notamment par la part consacrée aux percussions, très sollicitées ! –, qu’il emploie avec minutie. En cela, le Concerto pour piano et orchestre en sol majeur reflète aussi l’orchestre « à la française » : transparent et aérien mais dont les emportements peuvent s’avérer d’une puissance rythmique effrénée.
Charlotte Ginot-Slacik
Piano prodige
Samedi 4 février à 20h
Découvert l’an dernier à Toulouse, le jeune pianiste Tom Borrow affiche une maturité saisissante et semble ne connaître aucune limite technique. Robert Trevino l’accompagne dans le Concerto en sol majeur de Ravel, une oeuvre dont la virtuosité transcendante exige aussi un pianiste-poète… Le chef américain adjoint au chef-d’œuvre de Ravel la Symphonie n° 11 de Chostakovitch.