Le baryton Edwin Crossley-Mercer souffrant sera remplacé par Jóhann Kristinsson pour le concert du 15 octobre.

Une âme aux anges

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Une âme aux anges

Entretien avec Isabelle Faust

À l’âge de 15 ans, Isabelle Faust tente, pour voir, un concours international de violon… qu’elle remporte. Sa carrière de soliste internationale est lancée. Elle vient pour la première fois à Toulouse, accompagnée de son Stradivarius « La Belle au bois dormant », pour défendre une œuvre encore méconnue, bien qu’elle soit écrite par l’un des plus grands compositeurs romantiques : le Concerto pour violon de Schumann.

Vous vous êtes fait l’ardente championne du Concerto pour violon de Schumann, qui reste très rarement joué ! Qu’est-ce qui vous touche tant dans cette pièce ?

Ce concerto est l’une des toutes dernières œuvres composées par Schumann, juste avant son placement en clinique psychiatrique. Clara Schumann et Johannes Brahms ont alors décidé que ses pièces du dernier style n’étaient peut-être pas adaptées au grand public. Schumann a tout le même eu le temps d’assister à une répétition de ce concerto avec le violoniste Joseph Joachim, qui s’est alors montré très enthousiaste. Il a cependant émis des réserves par la suite, au point de demander l’interdiction d’éditer ou interpréter ce concerto pendant cent ans. Difficile de présumer des causes de ce revirement avec certitude, mais celles-ci sont probablement dues davantage à l’attitude de Clara Schumann et Brahms vis-à-vis de ce concerto, qu’à des raisons purement musicales. Le retour en grâce de l’œuvre a pris du temps, et quand je vais la jouer avec un orchestre, je réalise souvent que l’ensemble ne l’a encore jamais donnée ! Mais sa renaissance s’accélère depuis une quinzaine d’années. Personnellement, je l’adore. Elle a une touche extrêmement personnelle, qu’on peut rarement percevoir dans un concerto pour violon, où le but est souvent de mettre le soliste en avant et de déployer toute la virtuosité dont il est capable. Ici, il faut aller chercher dans des régions très secrètes, à l’intérieur de l’âme, celle de l’auditeur aussi bien que celle de l’interprète. Nous sommes déjà dans un autre monde. Il faut peut-être du temps pour se retrouver dans cet univers si singulier, mais une fois que l’on y est entré, on n’a plus du tout envie d’en sortir !

Dans quel contexte avez-vous joué ce concerto pour la première fois ?

Robert Schumann d’après un tableau de Carl Jäger. © Österreichische Nationalbibliothek

Évidemment, ce n’est pas le concerto romantique que l’on joue en premier lors de ses études. Il sort de la ligue Beethoven-Brahms-Mendelssohn ! Pour mes débuts avec l’Orchestre philharmonique de Berlin, je souhaitais justement trouver une pièce originale, qui sorte un peu des concertos très attendus. J’avais déjà pris goût au monde si particulier de Schumann en jouant ses œuvres de musique de chambre. Et j’ai ainsi jeté mon dévolu sur ce concerto.

Vous avez enregistré ce concerto sous la direction de Pablo Heras-Casado, et avez alors opté pour des cordes en boyau. Ferez-vous le même choix pour votre concert à Toulouse ?

Le choix des cordes dépend de l’ensemble avec lequel je joue. Dans le cas de cet enregistrement, je jouais avec l’Orchestre baroque de Fribourg. Il valait mieux utiliser des cordes en boyau pour m’intégrer harmonieusement dans le son général. Ce ne sera pas nécessaire avec un orchestre sur instruments modernes, comme celui du Capitole !

Portrait de Joseph Joachim (1831-1907) dessiné par Adolph von Menzel, vers 1853. Guildhall Art Gallery. © DR

Vous avez un rapport particulier avec la France : pouvez-vous nous dire pourquoi ?

Effectivement, la France tient une place spéciale dans mon cœur : j’y ai vécu plusieurs années, mon mari est français, et mon fils bilingue ! Cela a d’ailleurs intensifié ma relation à la musique française, comme celle de Fauré et Dutilleux. Mais je n’ai encore jamais joué avec l’Orchestre du Capitole : il était temps ! J’ai hâte de découvrir ce fabuleux ensemble, et cette si belle ville.

Comme le virtuose Joseph Joachim, qui a inspiré beaucoup de concertos à son époque, vous êtes la dédicataire de nombreuses œuvres.

En effet, j’ai créé pas mal de concertos, et en ce moment-même, certains sont en cours de composition pour moi ! Il y a beaucoup de choses à faire avec la musique actuelle. C’est un peu effrayant, car découvrir de nouvelles œuvres prend beaucoup de temps, mais c’est passionnant de travailler avec les compositeurs d’aujourd’hui. Cela change tout de pouvoir s’adresser directement à un être vivant. Quel dommage de ne pas pouvoir interroger Bach ou Mozart !

Propos recueillis par Mathilde Serraille


LE CONCERT

Isabelle Faust © Felix-Broede

Fleurs de printemps

Grand concert symphonique

Samedi 25 mai à 20h

En cette fin du mois de mai, savourez un programme sous le signe du printemps. Lili Boulanger, première femme à remporter le Grand Prix de Rome en 1913, montre avec D’un matin de printemps, une créativité foisonnante, avec une précocité comparée à celle d’Arthur Rimbaud ou de Raymond Radiguet.